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L'histoire de la harpe

La harpe est très certainement l'un des plus vieux instruments au monde.
Son origine se perd dans la nuit des temps. Les premières représentations retrouvées remontent à environ 5 millénaires avant Jesus-Christ.
On différenciait à cette époque la lyre et la harpe de par leurs conceptions légèrement différentes: la lyre possède des cordes de longueurs égales partant d'un même point de fixation alors que la harpe a ses cordes parallèles et de longueurs inégales.

La harpe a ensuite évolué dans le croissant fertile (Mésopotamie) et ensuite dans l’Égypte antique. Elle devient un instrument sacré permettant de communiquer avec les dieux et de célébrer le culte.
Cette fonction liturgique se poursuit durant toute l'Antiquité.
Son entrée dans le monde occidental n'est pas précise, mais il semble que l’Égypte ( dès la VI ème dynastie) avait des échanges commerciaux avec l'Eire (Irlande) pour ses mines d’Étain. Des harpes sont ainsi entrées en Europe par les pays Celtes. Les harpes étaient petites et facilement transportables ( entre 12 et 16 cordes), sculptées dans un tronc de Saule avec des cordes en cuivre, on en jouait avec les ongles.
La harpe a accompagné l'Irlande au cours de toute son histoire, elle apparait d'ailleurs sur son blason.

Elle fut ensuite introduite en Europe par la Bretagne, de culture Celte également.
La harpe est encore essentiellement diatonique alors que la musique devient de plus en plus chromatique.
La naissance et le perfectionnement des instruments à clavier comme le clavecin ou le piano forte entrainent un désintéressement pour la harpe.
A la Renaissance, pour pallier à cet effet, des luthiers italiens inventent la "arpa doppia". Elle est constituée d'une double rangée de cordes parallèles. La harpe comporte alors 58 cordes et se pose au sol, on la joue debout.

En 1697, un luthier Bavarois nommé Hochbrücker élabore un premier système de mécanisme par des pédales afin d'effectuer quelques modulations.
Pendant que la harpe tente de réussir son adaptation à la musique savante et à ses richesses harmoniques (ce qui fut long et laborieux), le piano et le clavecin séduisent de nombreux compositeurs....offrant plus de possibilités harmoniques.
La harpe est mise de côté en occident pendant cette période...

Dans d'autres parties du monde où la musique reste plus "modale" et populaire, la harpe remporte un vif succès comme en Amérique du sud.
Elle y fut importée par les conquistadores. Adaptée aux besoins de la musique folklorique locale, sa conception fut modifiée: toujours diatonique, sa caisse de résonance fut élargie et la tension des cordes affaiblie.
Elle comporte entre 32 et 38 cordes, en nylon, en boyau ou en métal. C'est un instrument soliste qui s'utilise en petit ensemble ou en orchestre. On la joue également debout ou même en marchant.

On retrouve la harpe sous d'autres formes encore en Afrique où en Asie comme le "Saung" en Birmanie qui reste l'un des plus vieux instruments encore joué aujourd'hui.

Mais revenons en Europe, où dans les années 1800, le fameux facteur de pianos Sébastien Erard invente le célèbre système de fourchettes à double mouvements. Actionné par sept pédales (une par notes de la gamme et trois positions permettant un "double mouvement" bémol/bécarre/dièse), cette invention ingénieuse va permettre à la harpe de reprendre enfin ses droits et de rivaliser avec les autres instruments chromatiques.

H. Berlioz sera un des premiers à la remettre à l'honneur dans ses œuvres symphoniques.
Le répertoire de la harpe de la renaissance au romantisme parait pauvre en pièces de compositeurs dit "majeurs". Mais il regorge de pièces non moins intéressantes de compositeurs dit "mineurs" comme N.C. Bochsa ou J.B. Krumpholtz.
En 1894, Gustave Lyon, directeur de la maison Pleyel, tente de renouer avec la harpe à double rangée de cordes. Il invente la harpe chromatique pour laquelle fut composé la pièce de Claude Debussy: "danse sacrée et danse profane". Mais ce système ne survécu pas à la mort de son concepteur, le double mouvement de pédales de Sébastien Erard ayant été considérablement amélioré.
Une seule classe de harpe chromatique subsiste encore aujourd'hui à Bruxelles.
La harpe classique actuelle est donc la plus sophistiquée qui soit. 47 cordes (donnant un ambitus de plus de six octaves), sept pédales, des cordes graves en métal sur âme en acier, le reste en boyau et l'extrême aigüe en nylon.
Mais l'histoire de la harpe ne s'arrête pas ici! en 2005, Jean-Marie Panterne invente pour une jeune harpiste devenue paraplégique une harpe automatique. Un système électropneumatique de passages de pédales complètement automatisé.
Outre l'aspect essentiel pour cette harpiste, ce système semble ouvrir un univers encore inconnu pour des combinaisons de pédales complexes, difficilement réalisables par des pieds humains, permettant ainsi d'aborder le jazz et d'autres styles de musiques encore... La harpe a encore de beaux jours devant elle et un beau chemin à parcourir !

Céline MATA